Anne Baudart – transmission de l’éthique

Transcription de la vidéo

Pensez-vous que l’éthique puisse s’enseigner ?

Si j’avais à l’enseigner, si demain vous me mettiez dans la salle d’à côté en me disant : « Faites-un cours ! », il me semble que j’examinerais d’abord… J’aimerais faire un cours d’histoire de l’éthique, faire un cours d’histoire justement. C’est peut-être sans doute ma pente naturelle qui est une pente assez historienne. C’est-à-dire comparer, au sein de notre culture, les divers rapports que nous avions à l’éthique suivant les âges de notre culture. Par exemple, comment se fait-il que le rapport éthique et politique se soit dénoué ? Pourquoi ? En vertu de quoi ? Donc, ça peut être une manière de l’enseigner.

Vous me dites : « Comment l’enseigner ? » Sous un biais de l’histoire. Ça peut être l’enseigner non pas : « Il faut faire ceci et ne pas faire cela », sous le mode un peu scolaire ; ce n’est pas comme ça que je la concevrais. Mais sensibiliser, faire en sorte que les étudiants, ceux qui aiment à se former – qui ne sont pas nécessairement des étudiants mais aussi des adultes qui sont dans le monde des affaires – s’interrogent sur leur société. Cela peut être par l’éthique précisément qu’ils vont prendre une distance critique et réflexive, plus que par un cours de philosophie très élaboré. L’éthique pourrait être un champ, me semble-t-il, assez médian, au milieu de nos préoccupations, pour pouvoir faire partie de nos préoccupations. Il suffirait d’un rien pour qu’on sensibilise à la nécessité de l’éthique. Que ce soit l’éthique du partage, que se soit l’éthique, je ne sais pas… Je ne vois pas au nom de quoi on n’enseignerait pas l’éthique !

Donc, éventuellement, partir d’études de cas, de situations qui posent un dilemme d’ordre éthique et avoir un débat ouvert avec les  étudiants ?

Cela peut être une des manières possibles, bien sûr, ce que vous appelez « étude de cas », mais je crois aussi que l’aspect doctrine n’est pas tout à fait à négliger, car il y a des éthiques. Ce n’est pas "la valse des éthiques", comme disait Etchegoyen. Il déplorait ça et moi aussi d’ailleurs. Il n’y a pas une éthique de tout, mais il y a une ossature à l’éthique à laquelle il faudrait sensibiliser.

Vous disiez : « Pas de théorie ! » tout à l’heure. Je crois à la théorie, mais une théorie facile quand même, sans difficulté. Quand Aristote dit de la politique : « Elle doit nous apprendre à bien faire et à s’abstenir… », sous-entendu du mal, c’est assigner à la politique, c’est-à-dire à l’art et à la science du vivre ensemble, une finalité éthique. Eh bien ça, je ne vois pas au nom de quoi on ne l’enseignerait pas.

Entretien réalisé le 16 novembre 2007

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