Anne Baudart – caractères et vertus éthiques

Transcription de la vidéo

Quels sont les caractères éthiques qui vous ont été les plus nécessaires dans votre vie ?

Le courage, c’est un très bon exemple. La capacité de résistance dont j’ai parlé tout à l’heure, pour moi c’est très actuel, c’est lié au courage pour moi. J’enseignais d’ailleurs hier aux étudiants, dans un cours de philosophie, que peut-être ce qui nous manque à certains égards les uns les autres, c’est cette capacité de résistance au politiquement correct dans lequel on est, à cette espèce de prêt-à-penser qui est partout, et qu’on se laisse insidieusement assez imbiber par... Je n’ai rien contre les médias, mais si l’on n’a pas une capacité de vigilance ou de résistance vis-à-vis de ce que les médias nous disent, c’est un peu dommage. Nous travaillons justement là-dessus, à partir d’un texte de Platon d’ailleurs, qui est sur le gros animal social. Le gros animal social, c’est la bête sociale, c’est-à-dire l’ensemble des choses qui nous gouvernent, et c’est d’actualité. Il y a toujours une actualité de problèmes sociaux dans l’existence. Et je disais finalement : « Le vrai courage, c’est la capacité de résister à ce gros animal social, qui ne va pas nous dévorer, on va essayer de ne pas être dévoré par eux. » Donc ce que je mettrais en exergue particulièrement, c’est ça : enseigner en essayant, par exemple quand même un peu, même si je ne me pose pas comme une héroïne particulière de film moral, mais leur enseigner cela comme étant l’une des caractéristiques fondamentales aujourd’hui. Parce que les générations actuelles, me semble-t-il, sont peut-être campées dans un individualisme atomisé, où ils auraient tendance à s’isoler les uns les autres, à s’unir uniquement pour une conjoncture très ponctuelle et à se désunir aussi vite. C’est-à-dire qu’ils n’ont peut-être pas comme dans nos générations – du moins la mienne – un ciment commun, une idéologie un peu motrice ou quelque chose de cet ordre-là.

Donc c’est vrai que la capacité de résister est peut-être plus difficile non seulement à enseigner, mais il faut faire un cours là-dessus ! Je leur disais finalement : « Les résistants et les collaborateurs, c’est de toute époque et c’est de toute situation. » Pour moi, le discours éthique, c’est celui-là. Ce serait  enseigner, ou donner les moyens intellectuels ou de jugement, au niveau de la volonté, de résister à ce qu’on pourrait appeler la force des choses, à l’ensemble des choses qui ne dépendent pas de nous.

Entretien réalisé le 16 novembre 2007

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