Sam Braun – définition de l’éthique

Transcription de la vidéo

Qu’est-ce que l’éthique pour vous ?

C’est très difficile à dire. Je crois que pour moi, l’éthique, c’est le code de relation entre les hommes, dans la mesure où ce code de relation permet aux hommes de vivre et non pas de se supporter.

Je crois que l’éthique, vivre selon son éthique, c’est pouvoir se coucher le soir et être heureux d’avoir vécu une journée de plus dans sa vie. Je crois que c’est tout ce qui nous permet de considérer les autres comme de même valeur que nous. Je crois que l’éthique, c’est..., elle ne peut être à mon sens que relationnelle entre les êtres humains. Je ne pense pas qu’on puisse  dire qu’un être humain se comporte selon son éthique s’il se balade tout seul dans les prés comme ça et qu’il passe sa vie dans les champs. Je ne crois pas que ce soit cela. C’est autre chose, là. Mais ça n’est pas, selon moi, cela. Selon moi c’est beaucoup plus au niveau de la relation entre les êtres. C’est beaucoup plus au niveau de l’amour, mais pas l’amour selon les religions, l’amour selon l’éthique, c’est-à-dire aimer l’autre, certes, mais surtout respecter sa dignité. Et c’est dans le respect de la dignité de l’autre, c’est dans le respect de sa propre dignité qui nous permet aussi d’être un élément constitutif de cette grande chaîne humaine que nous représentons tous et pour laquelle nous sommes tous des maillons. C’est cela pour moi l’éthique. Et lorsqu’un de ces maillons rouille, c’est malheureusement toute la chaîne qui risque de rouiller. Alors c’est très difficile à définir, bien sûr. Mais voilà, avec cette très longue définition que j’essaye de vous donner, c’est un peu ça pour moi.

L’éthique est donc essentielle dans la relation à l’autre ?

Vous savez, l’autre, c’est très important. Quand j’ai été déporté, quand j’ai été arrêté, le 12 novembre 43, je savais que j’étais juif, jusqu’alors, et ce jour là je suis devenu juif dans le regard de l’autre, comme a dit Sartre. Je suis devenu juif dans le regard de l’autre et, curieusement, quand on est juif dans le regard de l’autre, noir, arabe ou que sais-je encore, on est toujours un sale juif, un sale noir, un sale arabe, on n’est jamais un gars bien, jamais ! Et c’est ce code rompu ce jour-là, par les autres, qui fait que cette éthique – qui aurait dû continuer à me lier même aux petits Allemands et pourquoi pas –, ce jour là était cassée, a été rouillée, ce fameux maillon dont nous sommes tous des maillons en or.

Entretien réalisé le 14 mars 2011

Les commentaires sont fermés.