Hélène Grimaud – éthique et notoriété

Transcription de la vidéo

Comment résister aux puissances de l’égo, aux pièges de la notoriété ?

Mais c’est l’éthique du travail, en fait. C’est le fait qu’il n’y a rien de tel que le travail, que la tâche à accomplir pour vous remettre à votre place. Peu importent les nuages sur lesquels on a pu s’envoler à la fin d’un concert. « You’re only as good as your last concert”, is what they use to say [on n’est pas meilleur que ce qu’a été notre dernier concert. C’est ce qu’on a l’habitude de dire] et c'est tout à fait vrai. C’est chaque fois cette impression comme Sisyphe sur la montagne, qu’il faut recommencer chaque fois ; tout est à refaire. Et surtout, la musique vous remet à votre place. Elle est toujours plus forte que l’interprète, elle vous montre toujours qu’il y a tellement plus à découvrir, tellement plus à faire. Et même quand on a l’impression d’avoir donné le maximum, d’avoir fait tout ce que l’on était capable de faire à ce moment-là, on sait qu’il en reste, il en reste beaucoup plus, et c’est toujours le but de la fois suivante. C’est en même temps épuisant et extraordinairement gratifiant. C’est un moteur incessant.

Comment réagissez-vous quand vous êtes confrontée à la jalousie ?

Ce n’est pas toujours facile à vivre. En même temps, en regardant justement l’envers de la médaille, en l’occurrence - et là je le dis totalement à l'envers - il faudrait voir le bien qui sort du mal et réaliser pourquoi ces choses-là existent. En fait, il faut le prendre comme un compliment.

Le moteur de la jalousie c’est quand même de vouloir ressembler à quelqu’un. Ne pas apprécier quelqu’un, c’est simplement parce qu’on voudrait être à sa place et ça c’est quelque chose qui a permis aussi de faire évoluer la société. Il faut simplement rester dans cet esprit de d’abord rester soi-même et de donner ce que l’on peut donner, et d’essayer de le faire malgré tout. Ça n’est pas si difficile. Dans l’ensemble, même s’il y a eu effectivement des phases douloureuses dans mon évolution, ce serait hypocrite de vous dire le contraire. En même temps, en remettant les choses à leur place, on reste quand même conscient de la chance qu’on a et le sentiment de gratitude qui naît de cette de cette prise de conscience fait qu’on arrive à faire la part des choses quand même assez bien.

Entretien réalisé le 5 mars 2011

Les commentaires sont fermés.