Hélène Grimaud – éthique et bonheur

Transcription de la vidéo

Comment apprend-on à être heureux ?

Ça va vous paraître très cliché, ça n’en est pas moins vrai : c’est de savoir vivre dans l’instant, de savoir se réjouir des petites choses, néanmoins magnifiques. Ça peut être un échange très éphémère, ça peut être le sourire de quelqu’un, la possibilité de créer le sourire chez l’autre, par un mot que l’on peut prononcer. Voilà, ce sont des petites choses de tous les jours qu’il faut aussi savoir vivre comme si ce qui pouvait venir après n’avait que très peu d’importance. Je pense que c’est sans arrêt. Mais il y a cette tendance que nous avons malheureusement à toujours ruminer sur ce qui a pu avoir lieu ou également à se projeter dans ce qui pourra éventuellement être. C’est très dangereux comme jeu. Malheureusement on ne peut pas s’empêcher de le faire. Nous sommes humains aussi, mais c’est un obstacle, je pense, à cet état de contentement profond.

Faut-il travailler cette aptitude au bonheur ?

Non, je dirais que ça va, ça s’auto-entretient dans le meilleur des cas. Il y a aussi toujours des phases où il faut se recentrer, retourner ce regard vers l’intérieur, pouvoir puiser dans ses ressources et re-attiser la flamme. Ça n’est pas non plus quelque chose d’automatique. En fait ça suit une courbe, c’est un rythme assez naturel, biologique, organique, comme les marées. On sent des moments où on a l’impression d’avoir cette force inépuisable, cette vitalité, cette élasticité de pouvoir réagir à tout, et puis parfois on sent qu’on est arrivé là, au bout de ce mouvement, et qu’il faut un repli sur soi-même avant de pouvoir repartir et donc redonner.

Au regard de l’éthique, que vous apporte le contact avec les animaux ?

C’est très difficile à décrire, mais je crois que c’est la faculté de ressentir l’autre. Je trouve toujours ça plus facile chez les animaux que chez les humains, parce qu’il y a tellement de barrières que nous savons tous construire, que ce soit d’abord avec les mots, mais aussi avec des attitudes. Alors qu’avec les animaux il y a quand même cette magnifique possibilité de ressentir ce qui se passe sans aucun artifice, aucun retrait de leur part. Effectivement ça se travaille.

Même moi qui avais déjà une prédisposition pour le bonheur ou pour le contact avec l’autre, ou pour la faculté de vivre certains échanges dans la joie, les animaux m’ont quand même beaucoup appris là-dessus. Pour être honnête, plus que la musique.

Entretien réalisé le 5 mars 2011

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