Anne Delbée – transmission de l’éthique

Transcription de la vidéo

Pensez-vous que la pratique de l'éthique peut s'enseigner, et si oui comment ?

Moi il y a d'abord quelque chose qui m'a irritée pendant des années et qui maintenant me transfigure, c'est que combien de fois j'ai dit : "Qu'est-ce que j'aimerais être beau et con !" Au sens où j'en voulais à mon père et à l'enseignement que j'avais eu, religieux, de m'avoir donné une interdiction, un interdit plutôt, à l'intérieur de... mais vraiment... Je rêvais, mais combien de fois je me suis dit : « Pourquoi j'ai cette impossibilité de ne pas tout faire ? Quoi... l'idée quand même que quelqu'un vous regarde. Alors il faut se... je sais bien qu'il faut se faire soigner, psychanalyser, je ne sais pas... mais bon. Aujourd'hui je pourrais dire que c'est ma liberté, c'est ce qui me donne cette liberté profonde, intérieure comme ça, de me dire que je pourrais être dans les pires choses, je sais que c'est ce qui me tiendra. Alors je dis ça parce que finalement ça m'a été enseigné durement... durement au sens : « Tu ne tueras pas, tu ne voleras pas, du respect à tes parents, c'est-à-dire tiens toi droit ! » Quand je dis "durement", c'était avec une grande tendresse. Mais par exemple : jamais on ne se serait levé à onze heures du  matin chez nous avec mes parents, jamais, jamais on n’aurait fait... Le dimanche on avait le droit de rester un peu plus au lit, mais on allait à la messe. Et ce fait d'aller à la messe tous les dimanches, ce fait du déjeuner familial tous les dimanches, c'est ça aussi qui a été transmis, contre lequel à vingt ans on se rebelle: "Ah, je ne vais pas encore aller déjeuner chez mes parents, et tout ! " Mais quand on a perdu ses parents, qu'on est tout seul, là on se rend compte que ça voulait dire quelque chose, une continuité profonde. C'est-à-dire que moi je dis qu'il faut l'enseigner durement.

Donc enseigner un certain nombre de règles ?

Quand je dis : enseigner durement, oui, la règle et surtout la règle de la dignité humaine. Ça, ça me paraît… un enfant, dès qu'il est petit : « Tiens-toi droit ! »

Droit en toi ?

Quand je dis : « Tiens-toi droit ! » pour moi, c'est ça que ça veut dire, un enfant. C'est-à-dire que l'on doit absolument élever les enfants.

Entretien réalisé le 30 octobre 2010

 

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