Maurice-Ruben Hayoun – éthique et pouvoir

Transcription de la vidéo

Éthique et pouvoir, est-ce compatible ?

Je ne vois pas comment, sans une évolution cruciale de l’être humain, les gens bien  – pardonnez-moi, je ne veux choquer personne – se mettraient à s’occuper de politique. Imaginez que vous vous présentiez à des élections. Les gens qui sont en face de vous n’auront pas les mêmes scrupules que vous. Ils vont donc vous attaquer. Je me souviens, j’avais un jour discuté avec un jeune député européen, qui est devenu député à l’Assemblée nationale, qui maintenant va être maire d’une grande ville limitrophe de Paris. Il m’a raconté qu’on a insulté ses gosses à l’école, qu’on a crevé ses pneus de voiture, qu’on l’a réveillé la nuit. Mais quelle est la femme, quelle est la famille qui va accepter ? Pourquoi est-ce qu’on ne met par de l’ordre là dedans ? Pourquoi est-ce que dès que quelqu’un se présente ou veut se présenter...? Je crois que ça tient à l’essence du pouvoir. C’est pourquoi je pense qu’il faudrait raccourcir les mandats, instaurer des limites dans l’exercice des mandats, c’est-à-dire un mandat, deux mandats, et pratiquer quelque chose qui ressemblerait à une sorte de présidence collégiale et de direction tournante. Par exemple, je suis très sensible au fait que le président Sarkozy, et j’espère qu’il le fera, ait dit qu’au bout de deux quinquennats, s’il peut les faire, il fera autre chose. Il aura soixante-trois soixante-quatre ans, et ça ce serait bien. C’est-à-dire que vous ne restez pas, vous ne vous ankylosez pas, vous ne vous enkystez pas. Or lorsque vous dites ça à de vieux routiers de la politique, ils éclatent de rire. On racontait dans le journal Le Monde que, pour ne pas le nommer, M. François Léotard demande audience à l’ancien président M. Jacques Chirac, et lui dit : « Je veux arrêter la politique. » Il a dit ça dans Le Monde. Et l’ancien président de la République lui dit « Tu te fous de ma gueule ? » Ça peut arriver, ça peut très bien arriver et c’est vrai que pour celui qui a dit ça, le pouvoir était aussi indispensable que pour lui l’air à respirer. Ça ce n’est pas bon, ça c’est pathologique. Parce qu’un jour ou l’autre, on est appelé à quitter, même à quitter cette terre. Le plus tard possible, mais il y a quand même d’autres choses.

Entretien réalisé le 6 décembre 2007

 

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